Flower Power - Exposition Collective


FLOWER POWER

UN PRINTEMPS TRANSGRESSIF

Du 14 Juin au 6 aout 2020


52 ans après mai 68 et les pavés sous la
plage, un demi-siècle après la vague hippie et les pantalons pat d’eph, La
GALERIE ANNE DE VILLEPOIX nous convie à une autre révolution où les clameurs se
sont tues pour faire place à un peace and love plus affirmé que tendance.

Il est vrai qu’un trimestre de «confinement
pandémique» est passé par là, laissant derrière lui des milliers de morts, des
familles dévastées, des individus en quête de repères. De ces journées noires
où les chiffres des défunts tournaient en boucle et les discours devenaient
obsessionnels il n’y avait rien à tirer sinon des heures creuses et d’autres
schizophréniques.

Il fallait absolument couper le fil
d’actualité sur les manques, les erreurs manifestes, les «y’a qu’à, il faut»
des donneurs de leçons et se démarquer de cette ère du soupçon, voire du
 complotisme pour aborder l’après avec optimisme et un certain plaisir
libérateur.

« FLOWER POWER » n’est en rien
un revival et ne tombe pas dans les poncifs d’un passé retrouvé. C’est encore
moins un effet de mode, un pétard qui fait pschitt et s’éteint aussitôt. Les
choix des artistes sont affirmés et assumés, en rupture avec l’air du temps
mais s’inscrivant dans la durée, sur une ligne d’horizon qui s’étend jusqu’à
l’infini.

MARCELLA BARCELO, MARCOS BONTEMPO,
ARMANDO MARIÑO, ALBERTO SORBELLI et YVELINE TROPEA forment un groupe de
world-painters réunis pour la circonstance. Chacun vient avec sa sensibilité,
son style, sa perception d’un printemps de tous les possibles. Ce qui aurait pu
paraître disparate, décousu prend ici le foisonnement d’un bouquet aux senteurs
florales inspirées. Chacun amène sa flagrance picturale avec un bonheur non
dissimulé.

Ce délicieux jardin se nourrit
d’influences diverses, de notes méditerranéennes, de mystères africains,
d’épices caribéennes pour nous délivrer l’essence de la volupté, le charme
insolent d’un printemps délicieusement transgressif. Ce patchwork improbable
fonctionne à merveille pour le plaisir de nos yeux et des sens.

MARCELLA BARCELLO s’est éloignée de ses
terres catalanes pour se lover dans un Japon où une extraordinaire palette de
roses la porte vers un Éden réinventé. Ses compositions d’une étrange
sensualité oscillent entre la pureté originelle et une ode à l’amour. Rarement
ces dernières années on n’avait aussi bien traduit le langage des fleurs. Les
références impressionnistes comme la délicatesse du pays du soleil levant sont
ici mises en exergue pour que la jeune artiste donne libre cours à son propre
univers. L’amour s’affranchit de l’adolescence et se révèle entre pudeur
acidulée et un rapport fusionnel à la nature.

Il ne pouvait y avoir de paradis
terrestre sans une présence animale. Animale ou humaine ? Il y a tant de
connivence entre MARCOS BONTEMPO et ses chevaux qu’on finit par superposer, le
sujet et son auteur. La complicité entre l’équidé et son compagnon donne lieu à
une série de portraits colorés, expressionnistes où l’âme du peintre habite
celle du meilleur ami de l’homme. Argentin vivant à Ronda, en Andalousie,
BONTEMPO s’est plongé dans cette région aride où le catholicisme est encore
très présent. Vouant aux chevaux une passion à la fois poétique et nostalgique,
quasiment mystique, il entretient avec eux une relation que Cervantès n’aurait
pas renié.  

D’une Espagne à une autre il y eut des
caravelles et autres bateaux dont certains transportèrent des africains
jusqu’aux Amériques. Les Caraïbes furent sillonnées par des marchands
d’esclave, par des négriers qui ont généré une afro-descendance dont les rites,
les cultures se sont mêlées à ceux des autochtones. ARMANDO MARIÑO est l’âme
cubaine de ce jardin secret, un gourou qui nous envoûte avec la ferveur de sa
latinité et l’animisme d’une Afrique toujours présente. Il est une présence
essentielle de ce collectif auquel il apporte sa part de mystère, de vaudou et
d’arômes ensorcelants.

Comment ne pas s’attarder sur les fleurs
élégantes et profondément méditerranéennes d’ALBERTO SOBELLI ? Elles font
l’objet d’attentions particulières comme celles portées à des dames
aristocratiques dont il se fait le portraitiste. Elles sont ici en pâmoison, la
tête haute, la corolle offerte aux doigts délicats du jardinier amoureux.
Dressées sur leurs grandes tiges nos belles se prêtent à la vivacité du trait
et à un désir d’être courtisée. L’art du peintre n’est-il pas de donner des
éclats de vie à tout ce qu’il magnifie. C’est ici chose faite.

Le jardin nocturne et secret d’YVELINE
TROPEA est loin d’avoir livré tous ses mystères. Il est à la fois africain et
d’un ailleurs indéfinissable, un paysage perlé de légendes inconnues où l’on
perçoit des créatures divines et des humains. Flamboyant et énigmatique cet
havre de paix ne serait-il pas un rêve, un passage entre le réel et un
imaginaire habités par une artiste à qui l’Afrique et plus particulièrement le
Burkina Faso offrent un univers de contrastes. On se laisse prendre dans cet
entre-deux qui nous enchante.

Mais il n’y a pas de printemps sans
renaissance. UMAN, artiste trans genre, qui avait quitté sa Somalie pour
renaître aux USA symbolise à elle seule toute la complexité de la nature
végétale et, par la même occasion, de la nature humaine. Chrysalide fantasque,
papillon de nuit, elle se met en scène et se fond dans un jardin brumeux. Ses
aubes sont autant miraculées que sa vie, aussi déiicates que vindicatives. Ses
pétales blanches sont un hymne à la pureté et à la différence.  

Il ne reste plus qu’à plonger dans cette
atmosphère bucolique, à nous enivrer de ces couleurs qui du rose pâle au rouge
profond se révèlent être des terres d’accueil où il fait bon vivre. C’est
encore une fois une invitation au voyage vers des territoires de l’inconnu qui
tiennent en éveil notre curiosité. Ce nouveau langage des fleurs exerce un
délicieux pouvoir sur nos émotions.


Floréal Duran


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